1 décès sur 5 lié à la pollution de l’air
Des résultats alarmants
Près de 20% des décès dans le monde en 2018 ont eu pour cause la pollution de l’air extérieur liée aux énergies fossiles (charbon, pétrole et diesel principalement). Ce sont les conclusions d’une étude publiée le 9 février 2021 dans la revue scientifique Environmental Research, menée par des chercheurs en santé environnementale de l’université d’Harvard aux États-Unis, en collaboration des universités britanniques.
En France, près de 100.000 décès (17% de la mortalité totale) seraient attribués annuellement aux particules fines PM2,5 issues de la combustion des énergies fossiles, soit le double de l’estimation officielle des autorités sanitaires (48.000 décès, d'après l'évaluation de Santé Publique France en juin 2016). L’étude de l’université d’Harvard ne prend pas en compte les autres sources de pollution de l’air, comme les particules fines liées à l’usure des freins et des pneus des véhicules, ou encore aux feux de cheminées.
L’impact sur la mortalité sous-estimé jusqu’à présent
L’enseignement majeur de cette étude inédite est que le nombre de décès imputables à la pollution de l’air est très largement sous-estimé. L’étude se base sur un nombre sans précédent d’études récentes, notamment épidémiologiques, et une méta-analyse inédite. Grâce à ce corpus, les auteurs ont pu élaborer un nouveau modèle d’évaluation des risques liés aux PM2,5 des énergies fossiles, qu’ils ont par ailleurs réussi à isoler (charbon, essence, diesel). Ils ont ainsi mis à jour et revu à la hausse le risque lié à l’exposition aux particules fines des énergies fossiles.
Ces particules ultrafines sont particulièrement dangereuses pour la santé car elles pénètrent au plus profond des voies respiratoires et causent ou aggravent divers troubles cardiovasculaires. Les effets délétères des particules fines se font ressentir même en deçà de la limite préconisée par l’OMS (10 microgrammes par mètre cube en moyenne annuelle).
"Les jeunes enfants sont plus sensibles que les adultes aux effets néfastes de la pollution atmosphérique par les particules", et développent des infections des voies respiratoires inférieures, rappelle le rapport.
Les chercheurs ont constaté que les effets de la pollution sur la santé étaient largement sous-estimés, notamment concernant l’exposition chronique à de faible doses, comme en Europe ou en Amérique du Nord.
Toutes les particules ne se valent pas
Le professeur Thomas Bourdrel, du collectif Air-Santé-Climat et auteur de plusieurs publications sur la pollution de l’air, rappelle que "toutes les particules ne se valent pas". Parce qu’elles comportent un noyau central de carbone pur et qu’elles sont entourées à leurs surfaces d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) cancérogènes, les particules de combustion primaire d’énergies fossiles sont beaucoup plus toxiques que celles formées à partir des épandages agricoles ou des poussières du désert.
Une étude européenne coordonnée par l’Institut Paul Scherrer, publiée en novembre 2020 dans la revue Nature, montre que les particules issues de l’usure des freins et des pneus comptent parmi les plus dangereuses, en raison de leur potentiel oxydant.
L'étude montre que l'approche fondée uniquement sur la quantité de particules fines respirée n’est pas suffisante et propose la prise en compte d’un nouvel indicateur pour mesurer leur impact sanitaire : leur potentiel oxydant, c’est-à-dire leur capacité à attaquer les cellules. Par une série de réactions inflammatoires, les lésions oxydatives provoquées par les particules augmentent le risque de maladies pulmonaires et cardio-vasculaires. Aujourd’hui, le consensus scientifique attribue la nocivité des particules fines à leur taille. Plus elles sont petites, plus elles sont dangereuses car elles pénètrent plus profondément dans l’organisme.
De quoi penser que la mortalité due à la pollution de l’air reste sous-estimée, malgré les nouveaux chiffres alarmants de l’université d’Harvard.